Sixièmes de Premier League après leur victoire contre Brighton (2-1), les Cottagers vivent un début de saison idyllique. Habitués des allées et venues entre l’élite et la Championship, ils affichent actuellement un niveau de jeu prometteur pour le maintien tant recherché, et pourquoi pas plus…

Fulham ou la lutte contre l’ascenseur
Une défaite seulement en cinq matches, et contre le leader Arsenal s’il vous plaît. Le club du sud-ouest de Londres est reparti bredouille de son déplacement au nord de la capitale le week-end dernier. Les noirs et blancs avaient ouvert la marque grâce au poison des défenses, le Serbe Aleksandar Mitrovic, chipant le ballon à Gabriel perdu dans une tentative kamikaze de relance. Malheureusement, l’inévitable capitaine norvégien Martin Odegaard égalisa dans la foulée pour l’adversaire, avant que le défenseur brésilien coupable sur le premier but ne renverse le match in extremis sur un cafouillage. Cruel.
Malgré la déception de ne pas avoir stoppé la série de victoires des Gunners dans ce derby, Fulham présente un bilan très positif. Hormis le faux pas (0-2) en EFL Cup contre Crawley, pensionnaire de League Two (4e division), les débuts en championnat ont été encourageants avec un match nul au goût amer contre Liverpool. Là encore, la formation du Portugais Marco Silva a pu nourrir des regrets car elle a mené deux fois contre le dauphin de la dernière saison sur un doublé de Mitrovic.

Autrement, un score nul et vierge ramené de Wolverhampton – en tant que promu, on signe ! – et deux victoires, toutes à domicile. La première arrachée contre Brentford ; encore une fois, les Cottagers se sont fait peur, disposant d’un break d’écart avant de se faire rattraper. Mais à nouveau, Alexandre le Grand, l’Empereur des Balkans, s’est mué en sauveur. Rebelotte contre Brighton, contre qui il a marqué et distribué le ballon à l’origine du CSC de Lewis Dunk. Les Seagulls, encore membres du Top 4 offrant un billet direct pour la Champions League, ont été défait pour la première fois. Loin d’être anodin.
Pour un club habitué à faire l’ascenseur entre les deux premières divisions du football anglais, ce début de saison est satisfaisant au niveau comptable, mais pas seulement. Le contenu du jeu de l’équipe de Marco Silva est lui aussi satisfaisant, avec une équipe solidaire, mais aussi capable d’offrir de belles séquences par moment. De bonne augure pour obtenir le maintien?
Ce qui a changé
Pour comprendre la progression des Londoniens, il faut revenir sur les performances de leur buteur providentiel depuis l’exercice précédent. Au cours de la saison 2020-21, Mitrovic n’inscrivit que 3 buts en 27 matchs de PL, le Serbe traversant une période marquée par quelques blessures et contaminations de COVID. Mais ce sont principalement les choix tactiques de Scott Parker qui le relèguent au second plan. Le départ du coach, remplacé par l’entraîneur lusitanien Silva, ex du Sporting Portugal, de l’Olympiakos et de Hull, Watford et Everton en Angleterre, va tout changer.
Le technicien a connu un début de carrière faste à Lisbonne et à Athènes, y remportant respectivement notamment la coupe nationale et le championnat. En Premier League, sa réputation se ternit, ne parvenant pas à rester plus d’un an à la tête d’un club et à sauver Hull de la relégation en 2017. Mais sa signature en 2021 à Fulham demeure un succès époustouflant. 27 victoires, 9 nuls et seulement 10 défaites, champions de 2e division.. Surtout, c’est la force de frappe offensive qui impressionne : 106 buts, dont 44 accumulés par Aleksandar Mitrovic (en 43 matchs), soit un ratio invraisemblable !

Dans un schéma préférentiel en 4-2-3-1 orienté vers l’attaque, avec le natif de Smeredevo en pointe, l’équipe est portée sur un jeu de transition où les deux milieux pivots partent de l’arrière en soutien de leurs défenseurs, avant de chercher le relai avec le numéro 10. Une fois la “progressive pass” effectuée dans le bon tempo, c’est au regista de distribuer sur les latéraux et ailiers qui seront montés avec le bloc (similaire à Klopp) et ceux-ci délivrent les centres à destination de Mitrovic ou d’autres offensifs devant le but. Ainsi, il a pu se créer un gigantesque nombre d’occasions l’année dernière, et en convertir beaucoup.
Le dispositif de Scott Parker n’était pas si différent, mais c’est sûrement dans la solidité structurelle que celui de Silva s’est distingué. Il est le partisan d’un pressing sur les axes de jeu plus que sur les joueurs – ce qu’on appellerait le Gegenpressing. En gardant un bloc compact assez haut et réparti sur les zones de circulation de la balle, les joueurs de Fulham court-circuitent les possibilités de passe et se mettent ensuite à presser, à plusieurs ou non, les adversaires individuellement. C’est selon ce modèle que les Cottagers ont provoqué le but face à Arsenal dimanche (cf vidéo de StatisticsFC pour mieux comprendre).*

La philosophie de Marco Silva pourra faire ses preuves au premier échelon du football anglais contrairement à Parker qui, certes, réussit à faire grimper ses clubs, mais échoue après coup. Il a d’ailleurs déjà été limogé de Bournemouth, sans doute prématurément, mais son passif en Premier League peut expliquer la décision des dirigeants. Défensivement, les Whites ne sont pourtant pas une muraille actuellement (43 buts encaissés, 3e en 2021-22). Ils sont déjà à 7 buts pris en 5 rencontres, mais cela n’a rien d’alarmant tant qu’ils continuent à gagner des points, ce qui est la contrepartie d’un jeu très offensif.
Dans la présente équipe, les recrues se sont révélées payantes dans le respect du système prôné. Joao Palhinha, gros transfert à 20 M€ en provenance du Sporting Portugal, club bien connu du manager, a pris la place de Jean-Michaël Seri dans le milieu à deux pivots, Bernd Leno d’Arsenal, titularisé face à son ex dimanche et auteur d’un match convaincant (et revanchard ?). A noter Andreas Pereira de Manchester United occupe le poste de meneur de jeu, bonne pioche pour une dizaine de millions d’euros. Pour l’instant, les départs de Zambo Anguissa et Fabio Carvalho ne se font pas sentir, le recrutement est bon.
En maintenant l’avantage contre Brighton à Craven Cottage hier, enceinte dont la superbe ambiance a fait et pourra encore faire la différence, Fulham peut se rassurer et croire enfin en leur maintien. S’ils battent en plus des équipes en forme, tout est permis pour une saison peut-être historique. Finaliste de la Ligue Europa en 2010, le club est capable de se transcender pour retrouver la compétition et retenter sa chance, qui sait !