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Il était une fois, au beau milieu d’un désert connu autrefois pour être le sujet d’une littérature enchantée, la plus belle des compétitions internationales de football : la Coupe du monde.
Ce tournoi, qui avait fait rêver plusieurs générations depuis sa création en 1930, voulait continuer d’écrire sa légende sur les terres d’Orient et récompenser sa nation victorieuse de son prestigieux trophée dorée.
En effet, au début des années 2010, une organisation dédiée au bon et au juste déroulement des compétitions sportives de football décidait de déléguer l’organisation de la Coupe du monde 2022 au Qatar, nation jusqu’ici inconnue du tournoi international le plus prestigieux. Malgré un meilleur dossier de la candidature rivale, celle des États-Unis, l’émirat était choisi pour organiser le tournoi, lui permettant de rêver plus grand. Ce fut en réalité le début du cauchemar.
Il est de ces compétitions qui rassemblent. Il est de ces compétitions qui unissent. Il est de ces compétitions qui transmettent les plus belles émotions, et parfois les plus violentes. L’essence même de la Coupe du monde réside dans l’espoir de victoire et la peur de l’échec. La Coupe du monde au Qatar avait réussi l’exploit de diviser le Monde, là où elle devait le rassembler.
Entre enquêtes pour corruption visant l’attribution du mondial, le non-respect des droits de l’Homme et du travailleur après la découverte de la mort de milliers d’ouvriers sur les chantiers de construction des stades, la menace auprès de la communauté LGBTQIA+ d’emprisonnement ou pire en cas « d’exercice de leur passion » sur le sol qatari (allant jusqu’au refus pour les capitaines des sélections de porter un brassard aux couleurs arc-en-ciel pendant les matchs, et même de voir inscrit sur le deuxième maillot de la Belgique le mot « Love » pour symboliser le « One Love » prôné par les Diables Rouges) et rajouté à cela les atteintes à l’environnement pour achever les raisons de cette division.
Pour les atteintes à l’environnement, la liste est longue. Contentons-nous de rappeler que l’usage de la climatisation dans un stade de plein-air est utilisé pour ce mondial, avec tout le fléau écologique que ça implique et inflige.
Cependant, la Coupe du monde a de cet engouement que l’on ne ressent qu’une fois tous les quatre ans, expliquant la difficulté à la boycotter. Pour la plupart de ses suiveurs, elle a été la raison de rêves, et parfois d’histoires de famille. Renoncer à la regarder, ce serait alors renoncer à ses rêves, renoncer à sa propre histoire.
La sélection qatarienne espérait la créer pour sa première participation. Dans un groupe A homogène composé du Sénégal, de l’Équateur et des Pays-Bas, le Qatar avait l’opportunité de briller chez lui, devant son public. Et c’est dans un stade d’Al Bayt rempli de près de 70 000 personnes que le Qatar recevait la Tri, échappant ainsi au champion d’Afrique en titre, et à la nation européenne, considérée comme la plus redoutable.
Mais, pour le match d’ouverture dans une ambiance bouillante, il n’aura suffit que de trois minutes pour refroidir tout un stade, remettant en cause l’installation de la climatisation, moment choisi par Enner Valencia pour ouvrir le score pour l’Équateur. Le but fut refusé pour un hors-jeu limite, ne faisant toutefois que repousser la sentence. Un doublé de Valencia (16ème et 31ème) plaça la Tri sur la voie royale. Trente minutes auront suffit aux supporteurs qataris pour quitter le stade et laisser des cratères de sièges vides dans les tribunes d’Al Bayt. Lunaire.
Le score en resta là. Le Qatar venait d’écrire l’Histoire en devenant le premier pays hôte d’une Coupe du monde à s’incliner lors du premier match depuis sa création, 92 ans auparavant.
Hier, face au Sénégal, la sélection grenat était dos au mur. Malgré le premier but de son histoire dans un mondial à la 78ème minute, les Qataris encaissèrent trois buts, s’inclinant et devenant par la même occasion le « premier pays hôte à perdre deux matchs lors d’une seule phase de groupes d’une édition de la Coupe du monde » (OptaJean), se retrouvant éliminé dès le deuxième match de sa compétition. Le rêve qatari avait viré au cauchemar.
Pire encore, comme l’Afrique du Sud en 2010, le Qatar n’avait inscrit qu’un seul but en deux matchs, ce qu’aucun pays hôte, avant et entre ces deux nations, n’avait réalisé dans toute l’histoire de la compétition.
Dans un tournoi déjà orphelin de son hôte, ce mondial a tout d’un échec. De son attribution à l’élimination du Qatar, le long chemin de croix de la Coupe du monde semble toucher à sa fin. La traversée du désert aura-t-elle permis de retrouver l’essence même des compétitions sportives, le plaisir et l’union ?
En attendant la fin du cauchemar, l’équipe de France reçoit le Danemark (17h) avec comme objectif la qualification en huitième de finale, ce qui serait une première pour un champion en titre depuis le Brésil en 2006. Et si la fin de ce cauchemar passait par la possibilité de décrocher une troisième étoile ? Et si la fin de ce cauchemar en Orient passait par ce doux rêve bleu.